XIV. BARBARE

– on organise des territoires et on invente l’amour pour tenter la traversée –

BARBARE est un projet global de création artistique sur la place de l’étranger dans l’Union européenne. À la manière d’un Grand Tour du XVII° siècle ou d’une Odyssée homérique, Mélodie Lasselin et Simon Capelle se sont rendus dans les capitales des 28 pays de l’Union européenne pour interroger les fondements, les figures et les fantasmes de nos cultures, hier comme aujourd’hui. Expérience initiatique autant que fouille archéologique, ils proposent, accompagnés d’artistes pluridisciplinaires, de déplacer les frontières et de remettre en crise ce qui nous sépare de l’autre, ce qui définit l’étranger, ce que l’on nomme barbarie.

Après avoir façonné 28 épisodes autonomes liés aux 28 pays de l’Union européenne au sein d’un Musée Européen de la Traduction, la création prendra deux formes : BARBARE (odyssées), coproduite par Le Phénix scène nationale de Valenciennes en 2022, et BARBARE / locale, coproduite par Le Ballet du Nord – CDCN de Roubaix en 2023.

 

—« La langue de l’Europe, c’est la traduction. » —Umberto Eco—

—« Traduire, c’est mettre en scène. » —Antoine Vitez—

Nous partons de ce point : il faut renoncer à la possibilité d’une langue universelle et construire l’union dans la diversité (in varietate concordia).

L’Union Européenne a besoin d’une culture ouverte, faite de sensations, de structures, de territoires, et d’images qui révèlent la beauté des traversées, du passage d’une frontière, de l’ouverture à l’Autre.

L’expérience de cette richesse, il est nécessaire de la verser dans les formes de représentation, de construire d’autres modèles, d’autres langages, de lier les formes et les arts, et pour cela, traduire.

La genèse de BARBARE commence en 2014 lors d’une visite du camp d’Auschwitz-Birkenau en compagnie d’un jeune polonais, Marius. Comment parler, comment imaginer ce qui n’est plus là, ce qui manque, si l’on a pas conscience de ce vide, de cette absence ? Notre recherche élabore une histoire en plusieurs épisodes, performances ou représentations, impliquant l’ensemble des pays européens dans un récit sur la relation à l’Autre. Nous créons un musée éphémère et nomade d’oeuvres vivantes, captées dans cette entreprise de traduction, toujours en métamorphose, avec le désir d’accueillir le passage des spectateurs, de lui permettre de voir, d’entendre, de sentir une Europe poétique, politique, commune.

Nous allons sur les lieux européens de la mémoire, de la représentation, de la culture. Nous recueillons les pensées, les paroles, les différences et nous chargeons ensuite le plateau de catalyser nos souvenirs et nos émotions. Nous cherchons toujours la diversité, non pas construire une succession, une liste amplificatrice, mais bien une transformation des énergies et des regards. Chaque matière décide pour elle-même de sa constitution et se lie aux autres par la présence de ceux qui vivent dans l’espace à ce moment-là. Comme artistes performers, notre visée est le partage en temps réel, la découverte, l’expérience collective, l’amitié. Nous posons la question : quelle traduction opérer pour vivre l’Europe de demain ?