DANMARK
épisode de la création BARBARE / European Museum of Translation
installation vidéo (2021) 20′
idée & performance : Simon Capelle & Mélodie Lasselin
réalisation : Joseph David
son : Quentin Conrate & Baptiste Legros
mobilier : Léo Pacquelet
traduction : Camille Rønn
voix-off : Rebecca Tetens
Cette installation, conçue d’abord pour le plateau en septembre 2019, devient, grâce au soutien de la rose des vents – scène nationale Lille Métropole, de la D.R.A.C Hauts-de-France et du Théâtre de l’Oiseau-Mouche, un véritable meuble à double entrée, une table design où les convives partagent l’irrésolue nécessité de traverser le visage de l’autre, la réflexion du visage de l’autre. Les interprètes Simon Capelle et Mélodie Lasselin, spectres errants dans l’obscurité, dressent la table d’un repas où l’âme des êtres se métamorphose pour échapper à sa prison.
NOTE D’INTENTION
Arrivés au pays de Danemark (dont Hamlet affirme qu’il est pourri), c’est une étrange sensation à la fois de confort, de protection, et d’isolement qui s’est emparée de nous. Copenhague, ville-péninsule au nord de l’Europe, château protégé aux confins de la mer Baltique, regorge de lieux clos, depuis le quartier alternatif de Christinia jusqu’aux jardins de Tivoli, perclus dans une intériorité presque inaccessible. Dehors, sur les trottoirs, les visages des mendiants de l’autre monde sont encerclés d’un cordon qui nomme ce qu’ils sont : des étrangers.
Alors le film de Carl Theodor Dreyer, La Passion de Jeanne d’Arc, a surgi. Ces hommes, penchés sur le visage d’une femme muette, petite sirène qu’Andersen n’aurait pas renié, comme métaphore de la maison que nous habitons tous, notre corps, à la fois forteresse, miroir, mais aussi prison. Et l’impossibilité pour ces hommes d’accéder tout à fait à l’intérieur (violence de leurs tentatives), aux voix que Jeanne dit entendre ; cet échec de la pensée logique occidentale à maîtriser les atours de la métaphysique ; hommes religieux pris au propre piège de leur ascétisme, et incapables de tendre la main vers la souffrance, d’apaiser les larmes de la bouleversante Renée Falconetti.
RÉFÉRENCES
– Hamlet, William Shakespeare (1603)
– La Passion de Jeanne d’Arc, Carl Theodor Dreyer (1928)
– La petite fille aux allumettes, Christian Andersen (1845)
– La Petite Sirène, Christian Andersen (1836)
– Antonin Artaud, Oeuvres Complètes, III (1978)